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Sommet Canada-UE : une occasion manquée, mais encore possible

01 December 2023
Règlementation
Artist: Patsy Cheater

From Catalina, NL

Mitts made with harp seal fur

Photo taken by Brian Ricks Photography.

Sommet Canada-UE : une occasion manquée, mais encore possible

Le sommet Canada-UE suscite la déception parmi les communautés côtières et autochtones qui dépendent de la chasse au phoque

Par Doug Chiasson

 

 

Les 23 et 24 novembre, les dirigeants de l’Union européenne et du Canada se sont rencontrés pour le sommet Canada-UE à St. John’s, à Terre-Neuve-et-Labrador. Des réunions comme celles-ci offrent aux représentants gouvernementaux de haut niveau l’occasion de discuter de questions importantes pour leurs gouvernements respectifs, à huis clos et loin des citoyens ordinaires. Ce sommet, cependant, était différent. Au lieu d’être surveillé uniquement par des opposants politiques ou des lobbyistes, les habitants des communautés éloignées de l’Est et du Nord du Canada ont observé de près. Ils ont observé, parce le sommet s’est tenu à Terre-Neuve, où l’océan et ses richesses ont longtemps été le fondement de l’économie et de la culture.

 

Il s’agit bien sûr du même St. John’s qui était autrefois le port d’attache des bateaux à vapeur qui amenaient des centaines de Terre-Neuviens sur les glaces de l’Atlantique Nord pour chasser les phoques. Le même St. John’s où des célébrités européennes sont descendues pour tenir des conférences de presse devant les caméras de télévision pour attaquer la vie et les moyens de subsistance des chasseurs qui risquent leur vie sur la glace pour subvenir aux besoins de leurs familles. Le même St. John’s où, pendant plus de 30 ans, les élus du gouvernement provincial étaient assis sur des chaises en peau de phoque pour débattre des affaires du jour.

 

En 2009, les prédécesseurs de ces mêmes responsables européens acclamés à St. John’s ont interdit le commerce des produits du phoque canadiens, portant un coup dur aux communautés rurales de l’est et du Nord du Canada qui dépendaient de la chasse au phoque depuis des centaines d’années. Le règlement n° 1007/2009 a infligé des dommages incalculables non seulement aux communautés de Terre-Neuve-et-Labrador et du Québec, mais aussi aux communautés inuites du Nord canadien.

 

Les impacts sur les communautés inuites sont à l’origine d’une contestation de l’interdiction des produits du phoque devant la Cour européenne de justice, intentée par Inuit Tapiriit Kanatami et soutenue par l’Institut de la fourrure du Canada et d’autres parties prenantes. Cela a été suivi d’une contestation du gouvernement du Canada auprès de l’Organisation mondiale du commerce. Bien qu’elle ait maintenu l’interdiction, la contestation devant l’OMC a forcé l’UE à autoriser une exemption pour les phoques capturés par « les Inuits et d’autres communautés autochtones ».

 

Il s’agit d’une exemption qui, selon la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, « fonctionne bien » et qui représente un « bon équilibre » pour l’industrie du phoque, ce qui est complètement faux. Seuls deux organismes au Canada sont reconnus comme étant en mesure de certifier qu’un produit du phoque provient d’une récolte autochtone : le gouvernement du Nunavut et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. Un rapport de sa propre Commission (https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/HTML/?uri=CELEX:52023DC0633), indique que le Nunavut n’a exporté que deux peaux de phoque vers l’Europe en 2020 et les Territoires du Nord-Ouest ont exporté deux manteaux en peau de phoque en 2022.

 

Ce qui est peut-être encore plus révélateur, c’est que ce même rapport révèle que quatre États membres de l’UE affirment que « l’impact de l’interdiction est allé au-delà de l’objectif visé ». Ces quatre États – l’Estonie, la Lettonie, la Finlande et la Suède – ont tous encore leurs propres chasses au phoque, mais sont paralysés de la même manière que les chasseurs de phoque canadiens lorsqu’il s’agit de commercialiser leurs produits.

 

Dans des termes qui seraient étonnamment familiers à quiconque sur la côte Est du Canada, ces États expriment leurs inquiétudes quant aux impacts des phoques mangeant de la morue et du saumon, à l’infection des poissons par des parasites et aux impacts sur les pêches commerciales et récréatives.

 

Malheureusement, lorsqu’ils se sont réunis à St. John’s, les responsables européens et canadiens n’ont pas profité de l’occasion pour renverser l’injustice historique de 2009 qui a mené à l’interdiction des produits de phoque. Mais il n’est pas trop tard. La Commission européenne lance une révision du règlement sur le commerce des produits du phoque en 2024. Le Canada peut et doit travailler en étroite collaboration avec les États membres de l’UE qui ne sont pas satisfaits de l’interdiction, appuyés par l’industrie canadienne du phoque et les dirigeants autochtones, afin d’annuler la réglementation. Nous avons également besoin que la Commission européenne s’engage honnêtement et franchement sur les dégâts causés par cette interdiction et qu’elle trace la voie à suivre pour réparer les erreurs du passé. Cette conversation doit être menée aux niveaux les plus élevés et impliquer des représentants de l’industrie et des communautés autochtones directement touchées, et non les groupes animaliers extrémistes dont le but est de détruire le mode de vie représenté par la chasse au phoque.

 

Doug Chiasson est Directeur Exécutif de l’Institut de la Fourrure du Canada. Il a également été conseiller politique principal auprès de la ministre canadienne des Pêches et des Océans lors de la contestation par le Canada de l’interdiction du phoque par l’UE à l’OMC.

 

Références